Pédophile, Eglise, cléricalisme… Aller plus loin que l’émotion
Le contexte médiatique actuel est connu et abondamment commenté , il faut aller aux causes structurelles et chercher comment les transformer.
En distinguant avec prudence :
- Faits sociaux et croyances, la loi et la foi.
- Pédophilie, homosexualité et pédocriminalité. Le viol de la personne, dans son corps et sa liberté est un crime. L’homosexualité mal vécue peut amener à se taire.
- Opinion publique ( émotivité ) et Institution Justice (observation et temps long).
- Autorité (convaincre) et Pouvoir (contraindre) ; obéissance et abus de confiance.
- Justice et pardon : réparation de la faute et absolution.
- Conversion personnelle et transformation des structures.
Causes sociales profondes de la mise au jour des abus actuels, entraînant des changements de repères dans le ‘’lien’’ entre personnes et entre générations:
- Emergence des droits de l’Homme : dignité de toute personne humaine.
- Emergence en occident d’un droit de l’enfant: l'abuser sexuellement est un crime.
- Prise de conscience publique d’un ‘’crime’’ qui atteint durablement (psychologiquement) les victimes, et qui, venant de l’Eglise, est scandaleux.
- Evolution des législations dans la protection des mineurs, le viol, le respect des femmes…
- Changement dans le lien des générations ( barrière de l’interdit générationnel qui cède)
- Déclin de la figure paternelle, et montée du féminisme , liées aux conditions de vie sociale
- Libération sexuelle sous toutes ses formes
- Influence des téléréalités ou des mises en scènes sexuelles sur les réseaux sociaux.
- Libération de la parole jusque là contenue (fin de tabous, ou de secrets)…
Causes plus directement ecclésiales
- le prêtre ‘’sacralisé’’ comme ‘’représentant du Christ’’ depuis le Concile de Trente ou représentant de l’Eglise (Vatican II).
- l’enseignement moral dans l’Eglise qui vise à protéger l’institution contre ses détracteurs.
- la culture cléricale qui fait du prêtre un chef (cf François lettre au peuple de Dieu): de l’autorité spirituelle à l’autoritarisme.
- Parfois le manque d’attention portée à la demande du ‘’fautif’’ dans le ‘’prendre soin’’.
- La confusion entre homosexualité et pédophilie.
- La dichotomie entre clercs et laïcs : l’autorité législative et exécutive appartient à l’institution hiérarchique ; quasi absence des femmes dans le gouvernement de l’Eglise.
- la nomination des évêques en dehors de tout dialogue avec les Eglises locales.
- la culture du secret.
L’Eglise catholique et ses secrets
Références droit canonique
- Code canonique de 1983 : (can 1387) ‘’le prêtre qui, dans l’acte ou à l’occasion ou sous le prétexte de la confession, sollicite le pénitent au péché contre le sixième commandement du Décalogue sera puni, selon la gravité du délit, de suspense, d’interdictions, de privations, et dans les cas les plus graves, sera renvoyé de l’état clérical’’.
- Secret sacramentel : ‘’inviolable pour quelque cause que ce soit’’ (can 983)
- Interdiction absolue d’utiliser ‘’la connaissance des péchés acquise par une confession’’ (can 984). Si le confesseur passe outre, il est excommunié ‘’latae sentintiae’’ (can 1388).
Cependant le confesseur peut, sous réserve d’absolution refusée, insister fermement auprès du pénitent pour qu’il consulte un médecin ( qui pourrait dénoncer), voire prenne contact avec l’autorité judiciaire.
NB Dans le code pénal français, le secret professionnel doit être levé, en particulier en faveur des mineurs victimes d’agressions sexuelles (Article 226-14, loi du 2 janvier 2004).
Remèdes pour l’Eglise
Prière et jeûne sont nécessaires à la conversion personnelle comme le demande le pape François, mais ne suffisent pas socialement à la tolérance zéro, et à la transformation de l’Eglise catholique en ‘’peuple de Dieu’’, guérissant du cléricalisme. Il nous faut aller plus loin que l’émotion.
Dans les transformations à venir, quelques propositions non exhaustives :
* Accepter résolument que le droit civil s’applique à tous, y compris à tous les membres de l’Eglise dans les affaires publiques.
* libération de la parole et conversion personnelle du regard.
* Hiérarchie de service et hiérarchie de pouvoir.
* Créer des tribunaux ‘’ecclésiaux’’ (différents de ecclésiastiques) – niveau régional (provincial) – indépendants de l'évêque du diocèse pris en compte, composés de façon synodale d'évêques de la Région, de prêtres, de religieux(ses) et de laïcs femmes et hommes qui ont l'expérience de la famille. En effet, actuellement, dans un diocèse, l'évêque est à la fois : père, frère, éventuellement ami... et juge possédant le pouvoir (confusion des genres).
* Transformer la CEF (Conférence des évêques de France) en Conférence de L'Eglise de France... avec la difficulté de la représentation de tous et le risque d'organisation de groupes de pression (lobbying).
En ce temps de carême , prière, jeûne, partage sont des chemins de conversion et d’espérance.
« L'Eglise n'est pas l'Eglise du Christ parce que ses membres sont parfaits, mais parce que le Christ l'accompagne et veut passer par elle pour donner des signes qui la dépassent complètement. »
Les laïcs dans l'Eglise « ne sont pas des collaborateurs du clergé, mais des personnes réellement ''co-responsables'' de l'existence de de la mission de l'Eglise » Benoït XVI, Forum international de l'Action catholique
Chrétiens, baptisés dans l'Esprit, nous voulons vivre ensemble dans notre relation au Christ, nos relations entre nous dans l’Eglise et dans la société.
Sur le chemin du passage (Pâques) de la mort et de la résurrection, le chemin est ouvert !
Etienne FAUVET, Antenne Sociale Lyon, Commission faits de société, 6 mars 2019