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10 novembre 2022

Lecture pour … passer de '' l'avant'' à '' Avent''

Hervieu Léger

Danielle HERVIEU-LEGER et Jean-Louis SCHLEGEL,

Vers l'implosion ? Entretiens sur le présent et l'avenir du catholicisme

Seuil, 2022, 392p.

Les deux sociologues des religions sont bien connus. En cette période douloureuse et agitée dans l'Eglise de France et plus largement du catholicisme en Europe, leurs entretiens sans concession analysent la situation actuelle. La chrétienté d'avant n'existe plus et ne reviendra pas.

Dans une Église catholique éclatée, quels sont les signes qui adviennent (Avent) ?

Leur ouvrage historique et minutieux se présente en 4 parties et 10 chapitres : de Constantin au pape François.

I. Deux séismes

* Quand l'Eglise vacille : la révélation des abus sexuels

* Le catholicisme en pandémie : une situation de laboratoire... la messe à tout prix

II. Un catholicisme exculturé

* Exculturation : de quoi parle-t-on ? (trois facteurs : ruralité, famille, nature)

* Quand le croyant s'affirme comme sujet

* Le catholicisme dans la culture commune : présence continuée ou effacement ?

III. Brève histoire d'une Eglise bloquée

* Le concile Vatican II : des ruptures décisives

* Une logique de conquête : hors du territoire, point de salut

* Le cléricalisme, maladie auto-immune de l'Eglise catholique

  1. Perspectives d'avenir

* Le salut par les ''observants'' ? Le noyau solide

* Comment rester catholique ?

Que conclure ?

A l’Église et aux catholiques de trouver les réponses : la ''synodalité'' de l'avenir.

 

***

Quelques brèves citations pour donner envie d'ouvrir ce livre passionnant, lourd d'histoire, de présent et de perspectives.

«  Exculturation du catholicisme. Au sens littéral, l'exculturation, c'est la sortie de la culture.[...] l'institution religieuse n'a plus de titre à régir la société civile, mais aussi que le monopole universel de la vérité dont elle se prévaut se trouve radicalement mis en question. [..] Avec les bouleversements de la scène religieuse contemporaine [ …] la religion ne prescrit ni n'enveloppe plus l'organisation de la vie politique des sociétés démocratiques occidentales » p 69.

« Il n'y a pas de vraie prise de conscience de cette désaffiliation culturelle, ou alors elle n'est pas perçue comme grave. Elle n'est d'ailleurs pas non plus ''anticatholique'' ou ''antichrétienne'' : quand les prénoms chrétiens – y compris Marie !- n'ont plus la cote, ce n'est pas un choix contre la tradition chrétienne ou le christianisme, mais l'imposition ( ignorée comme telle ) de préférences largement dictées par les industries culturelles dominantes (télévision, romans, magazines...) »178.

«  La société contemporaine dénie à l’Église tout titre à régir les comportements humains, non seulement dans la sphère publique, mais aussi dans l'ordre de la vie privée et de l'intime : précisément les terrains où elle avait opéré son repli et déployé des stratégies d'emprises compensatoires à la disqualification politique que lui a infligée la modernité. » 99

«  La disqualification prend un autre sens, plus lourd de conséquences pour l'institution, quand elle résulte du scandale que l’Église cause elle-même, par son discours ou par le comportement de ceux qui se réclament de la vérité qu'elle entend porter au monde. Lorsque ces deux phénomènes se conjuguent, lorsque l'institution est prise en flagrant délit de double langage […] , ou, pis encore, lorsqu'elle viole elle-même les principes fondamentaux sur lesquels elle prétend faire reposer son autorité, les effets sont dévastateurs. » 100

« La ritualité est, pour les individus et les groupes humains, un des moyens de se signifier à eux-mêmes leur inscription dans une ''continuité imaginée'', hors de laquelle il leur est impossible (ou très difficile) de donner sens à la multiplicité fragmentée des expériences qu'ils vivent. En dépit de la marginalisation culturelle qui atteint le catholicisme en France , la ''continuité immémoriale'' que l'on prête aux rites chrétiens traditionnels garde, jusqu'à un certain point, une capacité d'attraction [ par ex le mariage à l'église NDLR ] au-delà de l'engagement croyant qui est supposé les soutenir. » 168

«  L'un des effets de l'exculturation est de transformer l’Église en entreprise de services rituels. »169.

«L’Église en contre culture ?  Si on parle de ''contre culture'', ce qui caractérise le catholicisme d'aujourd'hui, c'est la pluralité ( et les conflits inévitables) des manières de penser et de vivre l’Église comme ''contre culture'', dans une société qui se passe parfaitement d'elle et ne lui reviendra pas. Le devenir minoritaire qu'elle subit en France et dans toutes les sociétés occidentales l'assigne progressivement à devoir choisir : se penser comme contre culture ou disparaître dans l'indifférence générale. Toute la question est : quelle contre culture ? »337

« La réalité du terrain aujourd'hui, c'est une constellation mouvante de groupes, de communautés, de mouvements, de fraternités, d'instituts, de paroisses même... Ces ensembles - réels, mais aussi de plus en plus virtuels - se constituent et se transforment à partir des affinités et circulations des individus, se rapportent de façon plus ou moins critique les uns aux autres...

C'est la diversité, la pluralité, l'éclatement qui sont à l'ordre du jour. Dans l’Église catholique, des entités multiples ''vivent leur vie'', à plus ou moins grande proximité.

Il nous faut donc apprendre à observer et à penser l’Église ''par le bas'' et pas seulement ''par le haut'', c'est à dire par l'institution. Et cela ne vaut pas que pour les sociologues ! » 348

«  Pour faire droit à ce potentiel créatif, en prenant le risque des conflits qu'il va immanquablement générer , il faudrait inventer les principes et les modalités pratiques d'une ''communion'' qui rend possible, par la délibération, par la reconnaissance mutuelle et le partage, le tissage et l'expression du lien de la foi entre les communautés. Cela passe, au premier chef, par une redéfinition complète du rôle des évêques, des conseils et des conférences épiscopales, qui devront être les garants de ce lien de communion plutôt que les administrateurs et les gardes-frontières de l'uniformité ecclésiale .» 365

« Que serait un christianisme sans adhésion à la personne du Christ , sans la foi en son message qui a fait vivre et espérer les générations passées, sans la reconnaissance de sa ''loi'' ( l'amour universel du prochain) et sans les sacrements qui ''donnent '' la force et la consolation du Christ à ceux qui croient ? » 86

« Pourtant, dans l'état de minorité qui sera la sienne et qu'elle [ l’Église] devra assumer qu'elle le veuille ou non , n'est-ce pas la condition pour assumer non seulement sa survie, mais sa vie et , qui sait, un intérêt renouvelé pour ce que font et disent les catholiques. [… ]

A l’Église et aux catholiques de trouver les réponses : ce livre n'a pas été écrit pour ''désespérer Billancourt'' mais pour comprendre où nous en sommes, éclairer la transition déjà en cours et encourager la ''synodalité'' de l'avenir. »387

Lu par Etienne FAUVET, 10 NOVEMBRE 2022

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